Entrer en scène

"Jouvet [à l’élève qui vient d’achever sa scène] : C’est l’entrée en scène du personnage, c’est toujours la même histoire.

- Un autre élève : Si c’est ça, ça marche, si ce n’est pas ça…

- Jouvet : Tu ne peux pas te rattraper là-dedans, ce n’est pas possible.

- Paula : Ça vient que je n’étais pas au diapason.

- Jouvet : C’est ce qu’il faut trouver : l’entrée en scène"

 

Souvent :

 

"On est déjà sur le plateau" : voilà ce qu'on entend répondre à la question de savoir comment "ça" commence.

En l'occurence, ici, "ça" commence par un non-commencement... (sauf, bien entendu, si le fait d'être déjà sur le plateau est un choix de mise en scène qui montrera sa pertinence et sa justesse.).

Les plus futés ajoutent "Dans le noir"; le passage du noir à la lumière valant pour commencement...

En un mot : pourquoi et comment éviter de laisser la "paresse" faire du théâtre à votre place ?

Profitons de l'entrée en scène pour inventer et imaginer ?

L'entrée est une naissance : naissance de la pièce mise en scène; (re) naissance pour chaque scène; (re) naissance pour chaque entrée en cours de scène...

Il n'y a pas, loin, très très loin s'en faut, de "bonne" entrée qu'il suffirait de (re) faire jusqu'à la nausée.

En revanche, on peut, on doit se dire qu'une entrée mérite amplement qu'on y réfléchisse. Se mettre à réflchir au lieu de laisser faire le hasard, la paresse ou le "petit-bonheur-la-chance" est déjà une victoire

 

Réfléchir mais à quoi ?

 

*La question du lieu (sur le plateau, la scène, sur l'espace de jeu ) de l'entrée. Par où entrer ? La question elle-même peut se décliner. Est-ce un début absolu ? Y a-t-il des personnages déjà en place ? (l'entrée se fait-elle à leur insu ? attendent-ils une arrivée ? l'arrivée du nouveau est-elle une surprise ?). Et puis, essayons : entrée par le fond ? à jardin ? à cour ? à quel endroit de jardin ou de cour ?, à l'avant-scène parce qu'on vient de la salle ? Enfin quel que soit l'endroit où l'on joue (dans une salle de théâtre ou dans une salle de classe, sous un préau, dans une salle polyvalente, dehors...), toujours chercher si quelque chose ne peut pas faire office de "porte" (entre le hors-scène et la scène) ? De porte "réelle" ou de porte "symbolique" ?

*La question du rythme (vitesse, décision, allure). Dans le passage du hors-scène (on admettra qu'on n'y est pas visible des spectateurs) à la scène, dans ce seul fait d'apparaître en entrant ou d'entrer en apparaissant, le comédien "envoie" immédiatement, avant même qu'il ne prononce le premier mot de son texte (sauf si ce texte l'oblige à parler depuis la coulisse),  les premiers signes lisibles et visibles de son personnage. L'entrée en scène 'lance" véritablement le train du personnage surde "combien des rails...

 

Donc, réfléchissons à cette entrée; ne la rendons pas banale ni insignifiante !

 

Bien évidemment, il est impossible -sauf à ne pas craindre la mort par ridicule- de donner la "recette" d'une bonne entrée, de "la" bonne entrée !

En revanche, en fonction du texte mis en scène, de la dramaturgie, de la situation dans laquelle un personnage "entre" un personnage, etc etc... on peut, on doit se poser un certain nombre de questions et surtout de multiplier les essais, en variant les attaques; c'est le "plateau" qui, in fine, dit la "vérité" (au sens de justesse) d'un "essai".

-à quelle vitesse entrer ?

-avec quelle allure

-de "combien" (de pas, de mètres...) entrer ? Rester au seuil, entrer d'un mètre.. s'approcher d'un autre personnage ?

-celui qui entre, quel angle ou quel point de vue a-t-il sur ce qui est déjà sur scène et en scène ? Que doit-il voir ? ou pas voir ?

-Entrée furtive ou entrée coup de théâtre ?

-marche "avant" ou marche arrière ?

-La voix du personnage précède-t-elle le personnage; l'accompagne-t-elle ou la suit-elle ?

-"vraie" entrée ou fausse entrée ?